Alerte verte en rase campagne

L’écologie a besoin d’ambassadeurs sérieux ou d’ambassadrices sérieuses pour qu’on les prenne au sérieux. Surtout en ces temps de campagne électorale radioactive, et même toxique. Entre deux saillies dignes des années 1930, il faudra bien trouver le temps de parler aussi de notre avenir. Or il dépend de la capacité des écologistes à placer ces préoccupations au centre du débat.

Mis à part Yannick Jadot, le parti Europe Écologie-Les Verts semble attirer comme des papillons les militants doués pour rendre triviaux ces enjeux. Comme s’il n’existait pas suffisamment de résistances, de lobbys, d’intérêts financiers puissants, les militants d’EELV – maires compris – semblent se donner le mot pour flatter la force d’inertie et la tentation du déni par un festival de sorties grotesques. Il faudra résister à la tentation d’en rire pour écouter les alarmes, très sérieuses, que ces excès recouvrent.

De mauvaises branches cachent une forêt d’experts, d’ONG et de propositions réellement constructives. Portée par une pétition signée par 2,3 millions de Français, « L’affaire du siècle » a remporté une bataille juridique décisive contre l’État, reconnu coupable d’inaction en matière de lutte contre le réchauffement climatique et de ne pas avoir tenu ses engagements en matière de réduction de gaz à effet de serre. Cette trajectoire devra être corrigée sous peine de coûter 78 millions d’euros par semestre de retard. Une goutte d’eau au regard d’un budget étatique, mais un début pour rééquilibrer une économie prédatrice. Il est temps de valoriser, et donc de chiffrer, les bénéfices d’une économie plus durable.

De se demander, tout de suite, avant qu’il ne soit trop tard, ce que nous coûtera par exemple la stérilité définitive des sols en Bretagne. Ce jour peut arriver si l’élevage intensif continue de galoper, au point de déverser en mer des engrais gorgés de nitrates et d’azote, qui finissent par tapisser les côtes bretonnes d’algues vertes toxiques, pour les bêtes comme pour les hommes. D’après Greenpeace, le gouvernement n’a rien entrepris pour lutter contre ce phénomène affolant, allant même jusqu’à « faciliter encore l’installation des fermes-usines sur le territoire breton ». Un crime contre l’avenir.

L’économie ne peut plus privilégier le rendement sur le futur.

Une action politique incitative, et pas seulement punitive, est encore possible. C’est l’une des propositions sensées que les sorties burlesques de Sandrine Rousseau ont masquées. La candidate malheureuse à la primaire, professeure d’économie, a suggéré que l’on trouve un moyen de valoriser – à la revente – les propriétés agricoles qui ont pris soin de leur sol et de la biodiversité. Cela permettrait d’accélérer la mue vers une agriculture responsable.

C’est de ce genre de propositions dont nous avons besoin lors de cette campagne. Pour respirer et avancer.

Caroline Fourest, Marianne, 22/10/2021

Une réflexion sur “Alerte verte en rase campagne

  1. Chère Caroline,

    Il est grand temps de réaliser que l’écologie et l’ économie ne sont pas antinomiques. Qu’ont fait les écologistes en 30 ans ? en 40 ans ? devrions nous dire. Porter un projet écologique est une cause si noble. Certains d’entre-eux devraient avoir honte d’être si puériles et si fatiguants depuis tant de décennies. Peu de citoyens français, qui pensent que le pragmatisme est une notion parfois bien utile dans notre quotidien, les écoutent encore. Hélas Allemagne, 3 fois(!) Il en va aussi d’un autre enjeu: celui de l’eau La prochaine guerre sera sans doute celle de l’eau. On peut vivre sans 🛢 pétrole , mais on ne peut pas vivre sans eau. L’eau, c’est la vie mais la vie ce n’est pas l’eau…

    Bien à vous, A.

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