Trente-huit degrés relevés en Sibérie. Jamais la planète n’avait connu un tel record de chaleur. D’après les météorologues, il s’agit de la température la plus chaude jamais enregistrée au nord du cercle polaire. Nous vivons le début d’été le plus suffocant depuis cent trente ans.
Le réchauffement climatique s’accélère, à une allure qui devrait nous glacer. D’ici à 2100, 30 % du pergélisol (« permafrost » en anglais), cette couche de glace qui couvre un cinquième de la planète, pourrait fondre. Or elle contient de nombreuses souches de virus, inconnus ou oubliés, du mercure du méthane et du gaz carbonique, qui vont se libérer. Les bactéries risquent aussi de prospérer. Vu du futur, l’épisode Covid-19 finira par ressembler à une simple « grippette », en effet.
Pendant ce temps, les conférences sur le réchauffement patinent. Le sommet mondial sur le climat est reporté à 2021 pour cause de coronavirus. Hautement responsables, les écologistes manifestent numériquement. Leur civisme nous épargne au moins un déluge de foyers épidémiques.
DÉSINVOLTURE
Nous ne pouvons pas en dire autant des insouciants sortis pour s’agglutiner et se chanter dessus à la Fête de la musique. Ni des rassemblements géants à répétition pour crier sa colère contre la police ou des statues. Depuis des lustres, les épidémies font flamber le racisme. Félicitons-nous d’avoir inversé la tendance… Reste à croiser les doigts pour que cet antiracisme ne fasse pas repartir le virus, puis le racisme en réaction.
Les soignants, au moins, avaient de vraies bonnes raisons d’être dans la rue. Si nous les oublions, si nous ne réformons pas en profondeur notre système de santé, l’hôpital va craquer. Cessons de croire que le décompte affolant des morts n’est qu’un épisode éphémère. Entre la fonte des glaces et les futurs coronavirus, les risques de canicule et l’arrivée de la génération « baby-boom » à l’âge critique, le nombre de décès quotidiens ne peut qu’exploser. Ce ne sera plus une « crise » exceptionnelle. Mais une longue et lourde décroissance de la population. Nous devons nous y préparer, surtout dans un pays aussi vieillissant que la France.
Plutôt que de réaliser des économies comme dans une entreprise, les agences régionales de santé ne devraient songer qu’à ça. Bâtir un plan national, multiplier nos lits, notre personnel hospitalier, créer une « génération soignante », préparer tout une chaîne permettant d’accompagner nos morts. C’est beaucoup moins sexy que de jouer aux Torquemada de « la race » contre des moulins à vent ou des statues. C’est pourtant le véritable défi de la génération qui vient. Elle le sait, elle n’a plus le privilège de pouvoir l’oublier. Nous habitons tous la même planète. Qui brûle, et fond.
Caroline Fourest
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