Georges Floyd : un modèle américain à bout de souffle

A l’image de George Floyd, l’Amérique n’arrive plus à respirer. Ce n’est pas le modèle que nous vendent les profiteurs de guerres identitaires. Après les attentats de 2015, de nombreux journalistes anglo-saxons prédisaient l’élection de Marine Le Pen, suivie du chaos. Aucun n’a fait son mea culpa pour s’être trompé de pays. C’est aux Etats-Unis qu’un président d’extrême droite a été élu. Là-bas que Donald Trump trouve systématiquement des excuses aux suprémacistes, des « bons gars ».

DANS LE CAS DE GEORGE FLOYD, LE RACISME SE VOIT À L’ŒIL NU

C’est aux Etats-Unis, où circulent autant d’armes que d’âmes, que la police tue en moyenne un citoyen toutes les huit heures. Près de 1 000 par an. Contre dix à vingt en France. Vertigineuse différence.

Est-ce à dire que tout va bien de notre côté ? Loin de là. Malgré une histoire différente, nous ne parvenons pas à endiguer le racisme. La police perd ses nerfs, et la confiance d’une partie de la population.

Dans les deux cas, le délit de faciès existe. Dans les deux cas, le plaquage ventral tue. En France, sa dernière victime s’appelle Cédric Chouviat. Un livreur de 41 ans, mort par asphyxie après une fracture du larynx. Comme pour Rémi Fraisse et les dizaines de « gilets jaunes » qui ont perdu un œil, la motivation raciste est exclue. Ce sont bien l’usage des LBD et le plaquage ventral qui interrogent.

Dans le cas de George Floyd, le racisme se voit à l’œil nu. Sous opiacés, il n’a opposé aucune résistance. Rien ne justifiait de l’asphyxier de façon sadique pendant huit longues minutes et demie.

COMPARAISON ?

Bien que tentante, la comparaison avec l’affaire Adama Traoré est injuste. Surtout pour Floyd, qui n’a pas pris la fuite ni bousculé ceux qui tentaient de l’interpeller. Ce qui n’excuse pas qu’on ait laissé Traoré mourir en garde à vue, sans s’inquiéter de sa détresse respiratoire. Toute notre doctrine policière, du plaquage ventral à l’usage des LBD, est à revoir.

C’est le débat que nous devrions mener si nous voulons sauver des vies. Ce n’est pas l’objectif des vendeurs de guerres identitaires. Eux rêvent de confusion entre la France et l’Amérique, de bavures suivies d’émeutes, pour importer le pire. Ils nous dissuadent même de nous unir pour trouver des solutions. On les entend déjà interdire aux Blancs de se mêler de ce débat, sauf s’ils s’excusent d’être « privilégiés ». Qu’ils soient caissiers, soignants ou « gilets jaunes » ?

N’est-ce pas là le meilleur moyen de transformer le combat universel contre les violences policières, qui révoltent enfin, en guerre identitaire ? De pousser les classes moyennes défavorisées, bientôt frappées par une crise économique terrible, dans les bras d’un bouffon, fascisant ou simplement vulgaire ? Décidément, il y a mieux à importer de l’Amérique.

Caroline Fourest

Marianne