Planning familial, La trahison relativiste

L’esprit relativiste s’infiltre partout. Le mépris pour l’universalité des droits, la haine du combat pour l’émancipation, ne sont plus l’apanage de l’extrême droite. De façon bien plus insidieuse, de soi-disant antiracistes – en réalité identitaires – exigent de soumettre notre quête d’égalité au respect des cultures et des religions.

Un appel au renoncement que l’on cultive avec ardeur dans les laboratoires libéraux de l’université américaine et française. Jusqu’à «déstructurer» en profondeur la nouvelle génération, libérale ou gauchiste. Les républicains des deux rives sont les seuls à tenir. Mais voilà que l’infiltration touche aussi les bastions historiques du féminisme et de la laïcité française : des associations qui ont marqué l’affaire Dreyfus, la loi de 1905 ou la loi Veil. Tous ces grands mouvements sont vérolés par le relativisme.

La Ligue de l’enseignement, la plus grande association d’éducation populaire laïque, a succombé depuis longtemps. Ce qui ne l’empêche pas de rafler l’essentiel des subventions pour prêcher sa nouvelle laïcité dans les écoles. La Ligue des droits de l’homme a suivi la même dérive. L’ancien fief des instituteurs laïques n’est plus qu’un club d’avocats défendant les droits des islamistes comme s’ils étaient Dreyfus.

Le plus décourageant est récent. L’universalisme vient de perdre le Mouvement français pour le Planning familial. La plus importante des institutions pour les droits des femmes, celle qui quadrille le terrain pour délivrer la pilule, aider en cas d’IVG, expliquer la sexualité, écouter, dans tous les quartiers, ne croit plus en l’émancipation. C’est ce qui ressort de la polémique déclenchée par son antenne des Bouches-du-Rhône.

On s’étonnait de sa façon de promouvoir du matériel de propagande anglophone mettant sur le même plan la nudité et le voile : «La nudité « empouvoire » les femmes» (avec une femme nue). «La modestie « empouvoire » les femmes» (avec une femme noire voilée). «Différentes choses libèrent les femmes. Le féminisme, c’est le droit de choisir»… Même le sexisme ? Dans un autre post, celui ou celle qui tient la page Facebook du Planning 13 est un peu plus clair : «La notion de liberté, elle, n’est pas universelle. Le féminisme ne défend pas des valeurs universelles, il défend la liberté de toutes les femmes à faire leurs propres choix, et le Planning familial aussi.» Etonnée de ce gloubi-boulga, une internaute a posé cette question : «Donc vous défendez aussi les femmes qui militent pour donner une bonne image de l’excision ?» Réponse du Planning 13 : «Comme déjà dit, on milite pour le libre choix de chacun-e, et que nous puissions chacune faire ce que nous voulons de notre corps sans projeter nos choix sur les autres.» Vite, un badge… «Touche pas à mon oppression !»

Naëm Bestandji, l’une des sentinelles de la vigilance laïque, a lancé l’alerte. Elle a été entendue. Des confrères nous expliqueront bientôt, pour enterrer tout émoi, qu’elle est partie de la fachosphère. La réponse du Mouvement français du Planning familial a tardé, avant d’inquiéter. Se défendant de «jamais avoir fait l’apologie de l’excision» (ce qui ne leur était pas reproché), son communiqué se contente de rappeler que le Planning agit contre toutes formes de mutilations sexuelles et contre les mariages forcés (encore heureux) «que subissent les femmes quelles que que soient leur origine ou leur religion». Puis il ajoute : «C’est un lieu ouvert à toutes sans discriminations.» Comme s’il fallait s’excuser de se battre contre les coutumes sexistes.

Si l’on ajoute que ses dernières équipes dirigeantes ont été élues grâce à des motions aux accents relativistes et indigénistes, on comprend – avec une immense tristesse – que le Planning n’est plus la maison du féminisme en lutte contre l’obscurantisme comme il l’a été depuis sa création, souvent sous la houlette d’Algériennes laïques.

La relève croit que «Mon corps m’appartient» est un bon d’achat pour pouvoir se voiler ou se prostituer. La prêtresse des Indigènes de la République qui lui sert de gourou ne va même pas jusque-là : «Mon corps ne m’appartient pas. […] J’appartiens à ma famille, à mon clan […], à ma race, à l’islam», écrit-elle dans un livre salué par Radio Courtoisie. Un credo que l’on trouvera bientôt affiché à l’entrée des Plannings ?

Caroline Fourest
Marianne 28 septembre 2018